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Renaissance Industrielle : mythes et réalités d'une France qui se cherche

Dernière mise à jour : 10 juin 2021


Alain Juillet est un dirigeant d'entreprises. Il a aussi exercé différentes fonctions dans la fonction publique au sein de la Direction générale de la Sécurité extérieure à la tête de la Direction du Renseignement entre 2002 et 2003, puis comme Haut responsable chargé de l'intelligence économique auprès du Premier ministre au SGDSN jusqu'à 2009. Il anime depuis 3 ans l'émission Eclairages consacrée à la sécurité internationale sur la chaine Agora News et deux fois par mois une chronique consacrée à la géopolitique sur RT France, branche francophone de la chaîne russe d'information internationale RT.


Le monde actuel est en pleine recomposition car les rapports de force qui donnaient la meilleure part aux vainqueurs de la deuxième guerre mondiale sont bouleversés par la montée des pays émergents. La France, se retrouve isolée au milieu du gué dans cette guerre économique où l’excellence technique est nécessaire mais non suffisante. Que faudrait-il pour un sursaut Français voir Européen ?


Nous avons vécu de 1920 à 1990 avec un monde bipolaire, avec d'un côté l'Union soviétique, et de l'autre côté les alliés derrière les Américains. En 90, quand le mur de Berlin est tombé, tout le monde a cru qu’on allait se retrouver avec une espèce de monoculture mondiale inspirée par les Américains. On s'est complètement trompé car on a assisté à la création de pôles dans lesquels les pays se regroupent en fonction de leurs proximités qui sont généralement multiples : l’économie, la culture, le climat, la religion, l’histoire, ou ce qu'on voudra. Chacun de ces pôles, constitués autour de pays puissants déjà identifiés ou de pays émergents à fort potentiel, veut affirmer son existence propre.


La conséquence, c'est que nous sommes face à une guerre économique terrible. Chacun de ces pôles veut s’affirmer au détriment des autres en occupant pleinement son propre terrain puis se développer en allant chercher ailleurs des relais de croissance. Aujourd’hui, la concurrence est exacerbée entre tous ces pôles, et entre les entreprises de ces pôles. Or ils ne jouent pas tous avec les mêmes règles. Certains appliquent les règles du jeu occidental que nous avons imposé au monde depuis 1945. D’autres considèrent qu’ils n’ont aucune raison de se plier à une vision et des standards imposés par les occidentaux alors qu’ils n’existaient pas en tant qu’Etats souverains. Face à eux il y a deux juges de paix: d’un côté les Américains qui veulent conserver leur leadership et de l’autre les Chinois qui sont convaincus que dans les vingt cinq prochaines années ils seront la première puissance mondiale. Nous sommes donc dans un système dans lequel la réussite économique repose sur le conflit économique avec tous les autres sous la surveillance des parrains. C’est à travers ce prisme qu’il faut regarder les pays émergents et les pôles qui en sont issus. Le pôle indien, le pôle brésilien, et beaucoup d’autres ont une volonté de réussite qui les amène à se battre pour défendre leurs intérêts stratégiques. Ils font face aux Américains qui défendent avec d’autant plus d’acharnement leur position de leader qu'ils sont en train de la perdre, ce qu’il ont évidemment du mal à accepter. ils se confrontent aux Chinois qui veulent retrouver la position de première puissance mondiale qu’ils avaient avant la fin du 18ème siècle et la destruction de leur Empire par les attaques occidentales.


Au milieu du champ de bataille, il y a l’Europe. Au regards des chiffres globaux, c’est la première puissance mondiale qui possède des capacités dans tous les domaines. Elle a tous les atouts et les moyens d'être un des trois grands acteurs majeurs pour ne pas dire le premier. Elle devrait donc jouer un rôle essentiel d’arbitre mais nous sommes fragmentés en plusieurs blocs très différents au niveau des besoins, des attentes, et des objectifs. De surcroit nos amis extérieurs d’Asie ou d’Amérique font tout pour qu’elle le reste afin de contrôler la situation à leur profit. Au plan économique, une Europe unie pouvant faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre selon son choix, aurait un potentiel extraordinaire au niveau mondial. Malheureusement les européens sont incapables de s’entendre réellement. L’Union européenne est un leurre quand on regarde la réalité en face. Les pays qui viennent de l'Union soviétique nous ont rejoint parce qu'on leur donnait des subventions pour se structurer et se développer. Mais leur problème majeur reste la défense contre le grand voisin du nord, le risque Russe. L’essentiel c’est d’être dans l’OTAN, car elle est dirigée par les américains, et ils les choisiront toujours contre le reste de l'Europe.


Ensuite il y a les pays du Sud, ceux que les pays du Nord appellent le club Med : La France, l'Espagne, L'Italie, la Grèce. Ils ne nous prennent pas au sérieux car nous sommes incapables de gérer nos pays avec rigueur et sans déficit. De leur point de vue, on pense trop à notre plaisir et pas assez au travail. Au delà de ce procès d’intention, il faut reconnaitre nous sommes parmi les plus mauvais sur le plan de la dette et ceci nous marginalise. L'Europe du Nord avait un certain respect pour les grandes puissances du Sud comme la France, mais notre incapacité à réduire nos dépenses et nos faibles résultats économiques sont en train de les convaincre que nous sommes en déclin par rapport à l’Allemagne.

Quel est le sursaut possible ? Il n'y a que deux alternatives :

  1. Est -il possible de faire une Europe réellement unie ? La réponse est non.

  2. Est-ce qu'il ne faut pas revenir à une Europe à 10 ou 12, c'est à dire l'Europe du marché commun dont la cohérence reposait sur une volonté commune et une unité de vision et de culture.

Dans ce sens, l'Europe du Sud était cohérente parce qu'on se ressemblait tous mais les choses ont changé avec la crise du Covid. L'Allemagne et la France ne font plus la course ensemble d’autant que l’Angleterre est partie. L'Allemagne ayant pris une avance considérable sur la France dans tous les domaines, en particulier industriel financier et économique, elle n’a plus aucun intérêt à jouer la carte d'une Europe du Sud puisqu'elle est très forte intrinsèquement et peut s’appuyer sur les pays du Nord et de l’Est. Pour exister et tirer notre épingle du jeu ne faut-il pas étudier une Europe du Sud plus étroitement unie qui forme un bloc dans l’Europe actuelle, celle ci devenant une fédération d'intérêts commerciaux. Cette union spécifique plus forte entre la France, l'Italie, l'Espagne, la Grèce et pourquoi pas le Portugal aurait du sens. De surcroit elle débouchera forcément sur des accords particuliers avec les pays de la Méditerranée ce qui permettra de mieux contrôler les flux de migration et les échanges. Je ne vois pas aujourd'hui d'autres solutions. Mais il faudra beaucoup de courage au politique pour le reconnaitre et le mettre en œuvre.


Dans le cadre du plan de relance économique sur l’écologie, la cohésion et la compétitivité, le gouvernement veut soutenir la montée en gamme des entreprises industrielles par la diffusion du numérique et l’adoption des nouvelles technologies. Est-ce suffisant tant les enjeux de réindustrialisation de la France sont importants ? Et surtout est-ce vraiment envisageable dans la compétition mondiale et avec quels atouts ?


D'abord un premier constat. La France est un des pays qui a le plus perdu de sa capacité industrielle durant les 20 dernières années. On a compris le désastre et on veut relancer la machine, mais combien de temps faudra-il pour reconstruire après avoir cumulé tant d'erreurs. On a laissé partir des usines et des groupes pour délocaliser à l'étranger dans des zones à bas coût de production. On a également laissé racheter nos start-ups et leur matière grise par les Américains, les Chinois et par d'autres. Beaucoup d’intelligence dans la Recherche s’est expatriée. La ré-industrialisation de la France, c'est une nécessité absolue pour avoir de l'emploi et faire travailler nos citoyens. On ne peut pas vivre uniquement sur les services. Le cas anglais est spécial car ils ont privilégié la finance et son environnement c’est à dire des services à forte valeur ajoutée qu’ils maitrisent parfaitement. Même voulue, la relance de l’industrie sera difficile car notre environnement ne s’y prête pas. Notre mode de vie, nos lois, et est contraintes européennes empêchent de pouvoir répondre d'une manière compétitive au niveau mondial. Nous sommes trop cher au niveau des charges sociales et sur le coût du travail qui est extrêmement élevés par rapport à tous les autres. L’Allemagne à un coût horaire plus élevé mais elle a moins de charges sociales et d’impôts. N’oublions pas que le poids de notre imposition fiscale et le poids des charges sociales atteignent un niveau record en Europe. De surcroit nos développements industriels sont pénalisés par la difficulté de financement via les banques françaises. Rares sont celles qui accompagnent les petites entreprises, les startups et les sociétés en développement. Cela tient sans doute à ce refus hexagonal de séparer les banques de dépôt et les banques d’affaires avec pour conséquence la priorité donnée à la maximisation du profit. En dépit des pressions gouvernementales nos banques ont trop souvent pour politique de prêter un parapluie quand il y a du soleil et de le retirer dès qu’il y a un nuage. Ce n’est qu’après avoir réglé ces 4 points qu’on pourra sérieusement penser à relancer l'industrialisation avec une chance de succès par rapport aux autres pays.


Permettez moi de revenir sur ce que vous disiez tout à l’heure. Comme on ne peut pas tout faire un jour, il serait sans nul doute très intéressant de développer le type de collaboration que nous pratiquons déjà avec le Maroc. Il faut utiliser la Méditerranée comme passerelle en additionnant les capacités et les coûts de main-d'oeuvre des pays de la rive Sud de la Méditerranée avec nos capacités en recherche et innovation ainsi que dans les hautes technologies. Ce type de partenariat réussit comme on le voit au Maroc avec les grandes sociétés aéronautiques françaises ou pour les constructeurs d'automobiles comme Peugeot. On retrouverait notre terrain de jeu millénaire et presque tous les riverains sont demandeurs. Mais ceci implique un redéploiement des relations diplomatiques et financières avec les pays concernés, du Maroc à l’Égypte en passant par tous les autres, pour rechercher les opportunités de collaboration. Je note que c'est ce qu'on fait avec succès les Allemands avec les Turcs. Nous avons une vision franco-française de la Turquie qui est très négative suite aux campagnes d'influence faites contre les Turcs, contrairement à l’Allemagne qui a développé un courant d'affaires extrêmement fort avec eux. C'est la même chose avec les Russes avec lesquels on pourrait imaginer de travailler beaucoup plus. Ils sont demandeurs, ont des coûts de main-d'oeuvre inférieurs aux nôtres et disposent d'énergies que nous nous n'avons pas. Là aussi, au lieu de les rejeter, on devrait mener des réflexions sur des projets communs d'industrialisations entre nos deux pays.


Vous défendez une industrie de l’armement puissante, pour que notre pays continue à peser sur l’échiquier mondial. La vente d’armes n’est pas qu’une simple affaire d’industrie car elle fait partie de la géopolitique et plus encore. N’est-ce pas identique pour les autres secteurs d’activités comme par exemple les laboratoires pharmaceutiques, l’IA, ou les énergies comme l’hydrogène ?


La France a absolument besoin d'une industrie de l'armement afin que notre Armée soit équipée d’armes performantes et sous notre contrôle. Quand vous achetez des armes à l'étranger vous n'êtes jamais sûr que le fournisseur jouera toujours le jeu avec vous. Il peut les neutraliser à distance s’il désapprouve votre action. On l’a vu avec les Etats Unis et Israel durant la guerre contre l’Irak. Les Israéliens voulaient faire un bombardement sur des sites de missiles supposés chimiques de Saddam Hussein. On a su plus tard que les américains avaient modifié sur zone la précision des GPS. Ainsi, on décalait la localisation des cibles de quelques centaines de mètres et les avions ne pouvaient plus décoller puisqu'ils ne pouvaient plus revenir à leur base. Entre parenthèse cela pose une question de morale mais on est dans la géopolitique.… Donc, nous avons désespérément besoin d'une industrie d'armement indépendante si nous voulons que notre armée soit forte et vraiment opérationnelle. Nous sommes les seuls en Europe, depuis le départ des Anglais, ayant une capacité de projection à l'étranger sur le plan militaire. Cette capacité militaire est notre dernier atout au niveau international. d’autant que les Américains reconnaissent notre efficacité et notre savoir-faire. Sans notre capacité nucléaire de dissuasion et notre capacité de projection nous ne serions plus membre permanent du Conseil de sécurité Notre sortie, au profit de l’Union européenne qui la réclame, consacrera notre passage parmi les nations de deuxième niveau.


Pour des raisons évidentes, l'Europe est en train de torpiller l'industrie de l'armement française de plusieurs manières. L'armement coûte très cher. Aucun pays, la France en particulier, n'a la capacité de produire de l'armement de pointe aujourd'hui et de l'autofinancer uniquement par ses besoins propres. Concernant le futur Rafale, on peut le concevoir et on sait le faire, mais si on ne le vend pas à l'étranger on se ruine car nous n’avons pas les moyens de le financer intégralement. Toute notre production militaire de haut niveau, du sous marin d’attaque aux missiles doit être vendue à l’étranger pour équilibrer les comptes. Or, sous la pression des verts allemands, l’Union européenne veut imposer des limitations à l'exportation d'armement en appliquant des règles qui seront votées par le parlement européen. Pour résoudre le problème du volume de production nécessaire, sachant que tous les pays ont besoin d’armement, l’Europe a créé un fonds d’investissement pour financer un armement européen. Il n’existe que lorsque des sociétés de trois pays différents présentent une demande: par exemple la France, l'Allemagne et un autre pays. Ceci pose aux industriels le problème des échanges requis de technologies et de savoir faire qui pénalisent les plus expérimentés dont nous sommes.


Mais ceci cache un deuxième problème : la plupart des pays du nord préfèreront acheter aux États-Unis. Regardez la Pologne : elle n'achètera jamais aux européens, car elle veut être bien vue par les Américains avec qui elle développe une relation privilégiée depuis le départ des anglais. Devenue la nouvelle Angleterre dans l'Europe, elle va défendre les intérêts américains et promouvoir leurs matériels. En dépit du financement à un groupe de trois sociétés de trois pays, il est clair qu’une partie des européens n’achètera pas.


La majorité du parlement européen serait prête à voter un texte interdisant d’exporter hors de l’Europe sans l'autorisation du parlement. Au delà du fait que ce projet de loi s’oppose à la souveraineté nationale, il est clair que ce texte tuera l'industrie de l'armement française en conditionnant nos exportations aux lois européennes. Si on veut éviter ce désastre il faut rappeler à l'Europe que depuis le traité de Rome, qui fut à l’origine de tous les accords européens, la Défense est un domaine régalien du seul ressort de l’Etat français. Elle ne peut

pas empiéter sur nos prérogatives et n’a pas le droit de nous empêcher de vendre de l'armement parce que c'est contraire au traité de Rome. De surcroit dépendre du parlement européen serait un piège mortel car l’Europe est incapable d’avoir une politique cohérente dans le domaine militaire en dehors de l’OTAN. Chaque fois qu'on essaiera de vendre au reste du monde un produit performant on aura comme d’habitude contre nous les Chinois, les Russes et les Américains, mais aussi une partie des européens qui bloqueront au parlement les ventes potentielles.


Les Américains, avec le DARPA, financent tous les grands projets militaires et beaucoup de ces programmes ont des applications civiles. Ainsi les financements ciblés sur la défense ont des retombées sur toute l'industrie américaine. Il en est de même pour les Russes et les Chinois. En France, pour aller dans le même sens, il faudrait qu'on ait une DGA plus ouverte au futur et des livres blancs faisant de la vraie prospective. Il faut retrouver l’esprit du CEA de la grande époque du nucléaire, en réaffirmant que le pays doit avoir une entité qui soit le centre de la véritable innovation. Dans ce cadre le CNRS ne doit plus se contenter de faire de la recherche fondamentale mais de la continuer par de la recherche appliquée comme le font tous les grands pays du monde. Quand la DARPA finance un projet, elle demande des résultats. Partant du concept de départ et en passant par la recherche fondamentale, l’institut de recherche ou l’industriel doit ramenez le produit fini. Cette dynamique, qui doit être impulsée par l’Etat, nous manque et nous pénalise. L’armement n’est pas le seul secteur d’activités à en souffrir.


La création de valeur pour l’actionnaire privilégiant les dividendes à court terme au détriment des investissements de recherche qui se rentabilisent dans le long terme, la plupart de nos industries perdent pied. Dans les années 80 -90, l'Institut Pasteur était considéré comme la référence mondiale au niveau des vaccins, la crise a montré son retard abyssal. Sanofi, créé par Jean-François Dehecq, à partir de Total, était devenu un des principaux laboratoires pharmaceutiques mondiaux en étant à la pointe dans tous les domaines. Aujourd'hui comparez Sanofi avec ses concurrents. Pour mieux rémunérer les actionnaires on a privilégié le court terme et on a perdu la guerre. Le retour étant impossible car l’écart est trop grand, il nous reste le rôle de sous traitant. La question est de savoir comment nous en sommes arrivés là. En remplaçant de vrais chefs d’entreprise par de purs financiers on a changé les priorités et on le paie très cher. Heureusement les vrais patrons existent et démontrent chaque jour que c’est le seul modèle qui marche, comme on l’a vu avec de Margerie pour Total ou on le voit avec Huillard pour Vinci. La démonstration est accablante et inquiétante pour l’avenir si on ne se réveille pas. Est- ce qu'il faut continuer subventionner des groupes improductifs qui cachent leur faiblesse par le rachat de starts-ups. Ne vaudrait il pas mieux en tirer les conséquences pour se recentrer sur ce qui présente un vrai potentiel de développement.


L'intelligence artificielle et le numérique sont des secteurs d’avenir. Il est vrai que les GAFAM américains et les BATX chinois ont pris un pouvoir considérable au niveau mondial. Mais nous avons en France des startups fantastiques qui sont à la pointe de la technologie. Le drame c'est que nombre d’entre elles sont rachetées par les anglo saxons ou les asiatiques parce qu'elles ne trouvent pas de financement en France en dépit des efforts de l’Etat qui a compris le problème. Trop souvent, des fonds d'investissements étrangers en prennent partiellement ou totalement le contrôle. La logique d’un fonds d’investissement étant de revendre au bout de quelques années, le rachat est fait généralement par des sociétés de pays étrangers qui ont compris l’intérêt de la technologie utilisée. Heureusement notre pays se réveille mais pas encore suffisamment. Il faut investir massivement sur les startups dans le

domaine de l'IA et du numérique .J'ajouterais également le quantique parce qu’il est l’avenir. On a vraiment une place à prendre grâce aux capacités de nos chercheurs et de nos concepteurs, mais il faut les aider car sur le plan financier ils ont du mal à trouver le moindre fonds. Comme les banques sont frileuses il faudrait convaincre les français d’y investir une partie des économies importantes qu’ils ont constitué pendant la crise du Covid. Pourquoi ne pas créer un grand fonds d'investissement pour les startups qui serait financé par les Français, ce qui permettrait de repartir les risques et de capitaliser sur nos points forts. Cette approche pourrait créer de l’activité et ouvrir des débouchés sur des activités d’avenir.


Pour les énergies si Total va bien, EDF va mal. En voulant supprimer le nucléaire qui était la force de la France et en privilégiant les renouvelables on augmente le coût de l’électricité sans régler le problème. Dans les prochaines années le gaz va avoir un rôle essentiel. Les allemands l’ont bien compris avec le Nord Stream II qui va leur permettre d’irriguer les pays européens. Le plus surprenant est la vente du gaz américain amené par méthanier qui coûte plus cher et surtout qui est du gaz de schiste. J’ai du mal à comprendre comment on va accepter de leur acheter du gaz de schiste alors qu'en France on en a interdit la prospection et l'exploitation pour des raisons écologistes. Sur les énergies nouvelles, il faut regarder les choses en face: le problème du renouvelable a été mal posé. L'écologie politique à la française à complètement faussé le débat sur l'écologie réelle et c'est dramatique parce qu'on ne veut pas voir un certain nombre de réalités. Je vais prendre des exemples. Il est évident qu'il y a un réchauffement de la planète et il faut être un imbécile pour ne pas le constater. Il est évident que l'Homme et la civilisation ont joué un rôle dans cette histoire de pollution multiple. Mais dans la recherche de responsabilité le premier problème n’est il pas la croissance de la population mondiale ? en passant de moins de 2 milliards d'individus au début du siècle dernier à 7,5 milliards actuellement n’est ce pas simplement l'homme en tant qu'être vivant qui est en train de tout polluer?


Au lieu de fa ire porter la responsabilité sur les voitures, les avions ou les vaches, ne serait-il pas raisonnable de se poser la question du nombre d’habitants de la planète qui va continuer à monter jusqu’à 11 milliards en 2100 ? Ne faut il pas étudier la possibilité d’une régulation des naissances comme on fait les Chinois ? Mais est-ce possible ? Dans le domaine de la pollution il faut indiscutablement prendre des mesures de lutte. C'est une évidence et personne ne peut être contre les énergies renouvelables. Mais les éoliennes terrestres sont elles la réponse au problème ? Comme le disent Stephane Bern et bien d’autres, la réponse est non. On paie très cher l'électricité des éoliennes qui ne marchent pas quand il y a trop ou pas assez de vent et obligent d’utiliser des centrales à gaz ou à charbon pour compenser les arrêts de production. C’est donc un produit inadapté à nos besoins réels. On commence à en prendre conscience malgré 20 ans de lobbying. Nous subventionnons des produits chinois en faisant la fortune que quelques hommes d’affaires malins sans se préoccuper des tonnes de béton, stabilisant des éoliennes de 100m de haut, que nous ne pourrons pas détruire lors de leur démantèlement. Les écologistes se rendant compte qu’ils s’étaient trompé veulent aujourd’hui les mettre en mer parce que cela gène moins et qu’on peut en mettre beaucoup. Pourtant le coût de l’énergie est toujours aussi élevé. Dans le domaine des panneaux solaires l'expérience marocaines est passionnante. Ils vont arriver dans la centrale solaire au sud du pays a à un coût d'énergie inférieur aux centrales nucléaires françaises. On peut donc faire baisser le coût de l’énergie renouvelable mais pour le solaire c'est extrêmement polluant à la construction et à la déconstruction des panneaux. Ainsi, cette solution, meilleure que les éoliennes, n'est pas totalement satisfaisante. La solution du tout électrique est la pire. La fabrication des batteries est extrêmement polluante. Aujourd'hui les gens se battent en disant qu'il faut absolument faire du tout électrique sans se rendre compte que la pollution des batteries est considérable tant pour la fabrication que le recyclage. En définitive elle est aussi grave que celle qu'on créait avant avec d’autres produits. Nous sommes victimes de la pression du terrorisme intellectuel de l'écologie politique qui en a fait son cheval de bataille. Les Chinois qui sont beaucoup plus réalistes et regarde à long terme ont lancés un énorme plan pour passer à la voiture à hydrogène. C’est évidemment la vraie solution d’avenir puisqu’elle ne consomme pas d'énergie fossile, n’utilise pas de produits polluants ou d’extraction polluante comme les terres rares, et utilise un carburant de quantité illimitée. Pourquoi en Europe on ne va pas directement à l'hydrogène ? Pourquoi passe t’on par l'électrique ? C’est le résultat d’une pression écologiste incapable de remettre en cause ou d’affiner ses analyses qui exploite le court terme sans tenir compte des conséquences économiques et sociales. Il faut du temps pour aller à l’hydrogène mais nous avions la solution intermédiaire avec les centrales nucléaire, qui produisent l’électricité la moins chère et dont la France était le leader mondial. Contrairement aux affirmations de certains, le risque réel d’un incident est minime. Si on prend le nombre de mort, il est évident que c'est beaucoup moins dangereux que les centrales à charbon qui ont été réactivées partout grâce aux écologistes. Plus de 50% des centrales dans le monde sont à charbon donc extrêmement polluante et posent de vrais problèmes de santé publique. Il semble évident qu’il faut continuer le nucléaire qui est beaucoup plus sûr qu'on ne le dit, et beaucoup moins, polluant que le charbon, même en comptant Tchernobyl. En mettant directement le cap sur l’hydrogène à 100% avec l’aide du nucléaire on aurait évité toutes ces opérations intermédiaires qui coutent chers, nous polluent et ne sont qu’éphémères.


Comment se battre dans cet échiquier économique mondial à l’échelle Française ? avec l’Europe ?


On peut tirer son épingle du jeu quand on fait la course dans le peloton de tête. Dans l'industrie pharmaceutique c'est fini, sur l'IA on peut y croire, sur les énergies nouvelles on peut réaliser des trajectoires intéressantes. Nous travaillons sur la fusion nucléaire chaude avec le projet ITER mais on peut aussi se pencher sur d'autres technologies comme par exemple, la fusion nucléaire froide. Il y a des domaines où l'on peut développer des approches très intéressantes pour le futur en étant compétitifs au niveau mondial. Seulement il faut être à l’affut pour repérer les innovations et les accompagner. Savez vous qui a inventé internet ? C'est un Français qui s'appelait Louis Pouzin, et en France personne ne le sait. La Reine d'Angleterre, il y a 5 ans, l'a décoré de l'ordre de l'Empire Britannique pour le remercier et nous avons attendu ce moment pour le découvrir et lui donner la légion d'honneur. On ne peut se battre sur l'échiquier économique mondial, que sur des domaines où l'on est vraiment performant et force est de reconnaître que l'on on n'en a pas beaucoup. C’est pourquoi i faut capitaliser sur les activités performantes. Le nouveau commissariat au plan doit identifier les domaines d'activités dans lesquelles nous sommes performants. C'est un travail à faire d’urgence car il sera le prélude d’une véritable réindustrialisation.


Y-a-t-il de nouvelles approches de doctrine dans la thématique de l’intelligence économique durant ces cinq dernières années en France ? si oui lesquelles ?


Il y en a plusieurs mais pas particulièrement en France. Elle s’appuient sur le développement exponentiel du numérique et de l’IA. Aujourd’hui on ne peut plus parler d'intelligence économique uniquement en travaillant dans le domaine de l’économie. La méthode est utilisée dans tous les secteurs d’activité. Pour analyser complètement une situation en intelligence économique, il faut intégrer des éléments qu'on ne regardait pas jusqu’ici comme la géopolitique, le droit ou la culture pour comprendre les relations, les rapports de force et les modes d’action. Le spectre des éléments d’analyse s’amplifie et permet de réduire la marge d’incertitude. L'intelligence économique ne prenait pas en compte l’histoire et les cultures ce qui nous a amené à beaucoup d'erreurs d’appréciation. On s'aperçoit que beaucoup d'opérations échouent par incompréhension entres les parties qui proviennent d’un choc culturel. On se trompe dans l'analyse et l’interprétation faite à travers notre vision parce qu'en face de nous la vision n’est pas la même. C'est ainsi qu’on s'obstine à croire que les Américains pensent comme nous parce que les premiers colons sont venus d’Angleterre avec le Mayflower. Mais on a oublié qu'entre temps, il s'est passé beaucoup de choses à commencer par la conquête de l'Ouest où ils ont massacré dans l'enthousiasme les populations autochtones et pratiqué la lutte pour la conquête, le colt d'un côté et le livre de

la loi de l’autre. Le western est un référent fondamental de leur histoire messianique alors que chez nous évidement, on n’en est loin. Le Président Trump était une parfaite représentation du middle west américain. En intelligence économique, si on passe à côté de ces réalités objectives, on ne peut pas comprendre les gens avec qui l'on est. On ne peut pas comprendre les mécanismes de fonctionnement de l'entité sur laquelle on travaille. Le troisième élément nouveau au niveau international c’est le social. On le traitait en France et en Europe du nord suite aux travaux de Seven Dedijer. On s'aperçoit aujourd'hui que nous sommes obligés d’intégrer cette dimension sociale dans l'intelligence économique globale parce que les peuples sont de mieux en mieux informés et ont accès à des informations qui leurs permettent de réagir où qui les font réagir si on n'y prend pas garde.


A côté de ces prises en compte il faut noter l’évolution vers une simplification du processus et de la méthode de collecte, d’analyse et de synthèse des données pour en faire des renseignements grâce aux nouveaux outils numériques et à l’Intelligence artificielle. Ils nous permettent de faire de l’intelligence économique augmentée. L’évolution du numérique est considérable et permanente. Tout change mais nous n'en sommes qu'à une étape parce que l'arrivée du Quantique va encore bouleverser tous les processus et les approches.


L’IE dans ses pratiques et usages d’aujourd’hui, serait-elle comme dernière chance pour un renouveau industriel en France ?


Pour moi une chose est certaine: dans tous les grands pays du monde et même dans des petits pays l’IE se pratique et se développe. L'intelligence économique moderne a été définie dans les années 80 par Michael Porter aux Etats-Unis. Jusqu’au début du 21° siècle, à part les Japonais les Anglais les Russes et les Américains personne n'en faisait sérieusement. Seule la France, avec Henri Martre et Bernard Esambert, avait manifesté son intérêt au début des années 90. Depuis 20 ans tous les pays forts ou émergents font de l'intelligence économique appliquée. Les Chinois se sont particulièrement bien adaptés. Ils ont appris beaucoup de nous mais ils ont su en tirer parti. Les israéliens sont redoutables et les Brésiliens sont très efficaces. On voit des pays d'Afrique structurer des réseaux d’IE internationaux et former leurs élites à cette discipline. Au Maroc, le plan quinquennal a été construit en utilisant l'intelligence économique et le royaume est au coeur d’un réseau IE couvrant toute l’Afrique.


Ainsi l'intelligence économique devient un élément fondamental de la stratégie. C'est un impératif dans la compétition moderne. Si on veut avoir une chance de réussir on est obligé de pratiquer l'intelligence économique. On n'a pas le choix. puisque tous les autres l’utilisent. La compétition mondiale c’est comme une course à pied et l'intelligence économique représente dorénavant les chaussures. Le renouveau industriel passe une prise en compte froide et objective de la situation à tous les niveaux y compris celui du politique. Si vous regardez les options internationales prisent par l'Etat actuel, le manque d’analyse est criant car à chaque fois on se trompe. On parle de défense européenne quand les autres européens n’en veulent pas. On va au Liban et cela ne sert à rien car les discussions sont ailleurs. Les Américains sont en train de négocier les accords d'Abraham qui redéploie tout le Moyen Orient, et visiblement on n’est pas au courant ou pire on ne l’évalue pas sérieusement. Face à ces erreurs d’appréciation répétitives, on doit se poser la question de l’efficacité de nos approches. Nos analystes valent ceux des autres pays donc c‘est la collecte d’informations qui est défaillante ou les dirigeants qui ne veulent pas croire leurs analystes. C’est un pur problème d’intelligence économique qu’il faut résoudre. Malheureusement ce problème existant dans de nombreux domaines publics ou privés est mortel face à des pays ou des sociétés qui ont su aller chercher les bonnes informations, c’est à dire les informations fiables car recoupées. L’information est le sang de l’entreprise disait Akyo Morita le génial créateur de Sony.


Vous avez rédigé ou co-rédigé de nombreux ouvrages dont un sur l’Intelligence Economique du futur. Quels en sont les principaux enjeux et principalement au regard de notre économie nationale ?


L'intelligence économique doit irriguer tous les processus dans tous les domaines. C'est un état d'esprit avant d'être une technique. Pour être le meilleur possible, je dois savoir ce que font les autres, je dois les comparer avec ce que je suis de manière objective. Loin de croire que je suis génial je dois analyser froidement mes forces et mes faiblesses pour pouvoir les comparer à celles des autres et savoir où m’améliorer pour créer la différence. A partir de là, je peux construire une réponse qui doit être la meilleure possible en tenant compte de mes moyens, de mes capacités et de mon environnement. Le premier point essentiel est donc l’état d'esprit qui, permet d’envisager les moyens nécessaires pour pouvoir justement aller plus loin. On va découvrir que cela suppose un certain nombre de préalables, concernant la sensibilisation et la formation. Au niveau national, la sensibilisation passe par la communication au monde économique, tandis que la formation passe par les grandes écoles et l’enseignement supérieur. Le constat est que nous sommes loin du compte quand on regarde ce qui se dit ou fait à l’ENA, HEC ou dans la plupart des écoles d’ingénieurs. Pour prendre un exemple qui parait loin de l’intelligence économique alors qu’elle s’y inscrit pleinement : la culture. Pourquoi l'art contemporain se développe tellement dans le monde entier alors que c'est souvent peu apprécié par ceux qui le regardent. C’est bien sûr une opération financière mais c'est aussi un outil qu'utilise l'Amérique pour développer le multiculturalisme, cette philosophie américaine dont on découvre un aspect avec le Black Live Maters. C'est tout un mode de vie et une philosophie qu’ils construisent et travaillent depuis des années. Depuis toujours Hollywood est le support de la vision américaine du monde dans lequel on va gommer les mauvais côtés de l'Amérique et mettre en valeur les bons, sachant que dans un message messianique le bien américain finit toujours par triompher sur le mal. Dans le même ordre d’idée, souvenons nous que l’URSS était arrivée à faire croire, via ses grands cinéastes, que le blé communiste des plaines d’Ukraine était plus beau et plus haut que celui du reste du monde. Nous sommes dans une politique d’influence au niveau mondial, et nous devons en être conscient pour ne pas en devenir victime. A Normal Sup, on devrait expliquer à nos intellectuels de hautes volée ce qu'est l'influence et comment ils sont manipulés. Comme ils sont intelligents, ils comprendront parfaitement et pourront servir de relais pour l’expliquer à d’autres en application du principe de la tache d’huile.


En intelligence économique comme dans dans beaucoup d’autres domaines, la sagesse commencer par apprendre à ne pas tomber dans les pièges tendus par l'adversaire sous peine de disparaitra dans la tourmente. Mais pour pouvoir le faire, en perdant sa naïveté, il faut avoir été prévenu pour identifier les choses telles qu’elles sont. Dans l'ancien testament, il est dit « si tu veux que quelque chose existe il faut le désigner par son nom ». Dans l'histoire du monde on sait depuis très longtemps qu’une fois le piège identifié on peut y faire face et l’affronter.


La Finance internationale, les GAFAM et le Cyber Monde sont des entités thématiques aux enjeux colossaux aux mains de quelques puissances. Que pouvons-nous entreprendre, s’il est encore temps, à notre niveau Français pour contrecarrer ces positions dominantes et avec quelles alliances possibles ?

La finance internationale, très influencée par les anglo-saxons, règne en maître. Pour bien comprendre la situation, permettez moi un rappel rapide. La fin de la deuxième guerre mondiale a permis la mise en place d’ industries capables de faire de la production et les sociétés étaient dirigées par des ingénieurs de production. En développant les usines, on a produit beaucoup trop par rapport aux besoins. Pour résoudre les excédents de production on a développé le commercial qui a pris la direction de l’entreprise. C’est en constatant malgré tous les efforts le plafonnement des ventes qu’on a inventé le marketing, qui consiste à amener les gens à acheter quelque chose dont ils n'ont pas besoin en étant convaincu que c'est utile. Ceci a permis de vendre plus que les autres. Dans un monde où les dirigeants étaient devenus des hommes de marketing on a pensé trouver une nouvelle différenciation avec la qualité totale des produits qui a permis d’améliorer considérablement la production. Pour améliorer la rentabilité on a dégraissé l’organisation en régulant les échelons hiérarchiques t en réduisant le personnel. C'est ce qu'on enseigne encore dans nos écoles de commerces. en expliquant que les licenciements font monter le cours de bourse. Pourtant les licenciement peuvent amener des catastrophes par perte de la connaissance et destruction de l’esprit d’entreprise. A chaque besoin et chaque mode l’histoire montre que l’on met des dirigeants répondant à la problématique. On est donc rentré dans celle des dirigeants gestionnaires chargés d’améliorer la rentabilité qui allaient devenir des cost killers pour maximiser le profit des actionnaires au détriment de l’intérêt de l’entreprise. Dans cette volonté de réduire les coûts par tous les moyens, la recherche est une victime toute désignée puis qu’elle ne rapporte pas un résultat immédiat pour la fin de l’année. Bien sûr cela fera disparaitre la société à moyen terme mais entre temps le dirigeant sera parti et la boite revendue. Les deux dernières décennies ont vu arriver les financiers en deux vagues. Ceux des fonds d'investissements avec retour sur investissement entre 3 et 5 ans, en payant l’achat de l’entreprise sur les bénéfices avant de la revendre. C’est un processus mortel à moyen terme. Maintenant on a les purs financiers. A travers toute cette longue histoire, je constate que c'est nous qui, par étape, avons amené les financiers à être à la tête des entreprises et des états-majors. Nous avons oublié au fur et à mesure tous les fondamentaux de l’entreprise pour n’en garder qu'un seul aspect et c'est tout le problème.


Les dernières crises économiques mondiales qui se succèdent viennent du fait qu'on a inventé dans les années 90 la création de valeur pour les actionnaires. Dans l’histoire du monde l’entreprise était une création faite dans un groupe social qui devait contribuer à le faire vivre. Elle permettait en amont de rémunérer ceux qui fournissaient des matières premières, en aval de nourrir les clients à un prix acceptable, et pour ceux qui y travaillaient de vivre correctement. Aujourd'hui c’est de moins en moins le cas. Au nom de la concurrence et du libéralisme on réduit les avantages de toute la filière tout en diminuant les coûts internes pour maximiser le profit de l’actionnaire. En lui sacrifiant tout le reste ont est en opposition avec le concept traditionnel d'entreprise et d'activité industrielle. C'est ce qui a tué notre industrie. Il faut redonner le pouvoir aux entrepreneurs, à ceux qui créent de l'activité et savent que le profit n’est pas la finalité mais le résultat de l’activité. Quant aux GAFAM ou aux BATX chinois un peu plus petits, jamais dans l'histoire du monde on a eu des sociétés aussi puissantes. Le seul moyen de les contrôler est de trouver des solutions de remplacements. Regardez l’affaire de la 5G en Europe. Cisco avait le marché de la 4G et Huawei est arrivé avec une 5G ayant deux ans d’avance. Évidemment les américains ont employé tous les moyens pour empêcher Huawei de les remplacer. L’européen Nokia n’avait qu’un an de retard par rapport aux chinois donc un an d'avance par rapport aux américains. Pourquoi l'Europe ne lui a t’elle pas donné les moyens nécessaires en décidant qu’elle ferait la 5G au niveau de l’Union. On se serait donné une liberté en repoussant les GAFAM et les BATX. Hélas, sous la pressions des lobbies et des oppositions d’intérêts nous avons été incapables de nous mettre d’accord et de le faire. Aujourd’hui c’est Nokya qui licencie alors que c'était la plus belle opportunité dans le numérique qu'on ait eu depuis très longtemps pour que l’Europe existe.


Sur les cyber-mondes, je crois que c'est une question presque philosophique. Je fais partie de ceux qui croient que l'homme ne pourra jamais être l'égal de Dieu parce que l'Homme malgré sa toute puissance ne sera jamais capable de créer l'univers. Nous ne sommes qu’un grain de sable infinitésimal dans le cosmos. Croire que l’on va dominer l’univers c’est se prendre pour l’Homme-Dieu, c'est à dire un individu immensément puissant grâce à la cyber, qui contrôle tout et va vivre à perpétuité . Cela me parait atteindre les limites de l’orgueil et de la démence. Heureusement la crise du Covid nous a rappelé l’humilité grâce à un petit virus qui nous a mis à genoux. Dans cette évolution annoncée par les grands maitres des GAFAM, un autre point me parait particulièrement inquiétant. Le cyber monde, c'est une entité dans lequel les transhumanismes, les gens connectés et les autres s’interpénètrent. Comme on ne peut pas être tous connectés, seules les élites le seront. Elles seront géniales pendant leurs connections et se sentirons proches de la stupidité absolue lors des déconnections. Psychiquement parlant, ça sera insupportable. Mais le pire sera pour la majeure partie de la population qui ne sera pas connectée. n’ayant pas accès au booster d’intelligence et de capacités, ils deviendront des esclaves ou des sous hommes que l’on clonera en fonction des missions à remplir.. Ainsi les GAFAM veulent nous amener dans un monde dominé par un petit groupe qui aura tous les moyens.


Un progrès non contrôlé aboutissant à des catastrophes qui obligent le monde à repartir de beaucoup plus bas, il faut savoir s’arrêter à temps.. Mais est-ce possible avec des groupes qui ont tant de pouvoir et de moyens ? Savoir à quel moment il faudra les arrêter, parce qu’ils présentent un danger pour l’humanité, avant que ce soit impossible est une responsabilité des États. C’est une des questions majeure pour les prochaines décennies.


Interview par Jean-Claude Fontanives, journaliste Parlement et Politiques Internationales

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